Le football en Allemagne à contre-pied
Les mensuels So Foot et 11Freunde vont à contre-courant de la commercialisation et de la médiatisation effrénées du football en misant sur une analyse approfondie de la “culture” footballistique.
Zlatan par-ci, Messi par-là, sans oublier Frank Ribéry et sa bande du Bayern, même en cette année sans Coupe du monde ni Euro, le football continue d’être omniprésent dans l’actualité. Cette domination toujours croissante du ballon rond s’accompagne d’une évolution de son public mais aussi des médias spécialisés. C’est le cas en France et en Allemagne avec deux magazines mensuels, So Foot et 11Freunde, qui tentent, avec un succès grandissant, de donner une vision décalée du monde du football.
“11Freunde est né en 2000 en plein cœur de deux phénomènes”, raconte Tim Jürgens, rédacteur en chef adjoint, “la commercialisation mais aussi l’intellectualisation du football. Face à cette commercialisation, il y a eu cette envie de garder l’amour pour le vrai jeu en s’intéressant à la tradition du football.” 11Freunde contraste ainsi avec les piliers de l’actualité sportive en Allemagne, Kicker et Bild. De même en France pour So Foot, lancé en 2003, qui se distancie de l’Équipe ou de France Football : “On ne se voit pas vraiment comme des journalistes sportifs”, décrit Stéphane Régy, rédacteur en chef de So Foot. “On va peu aux entraînements, aux conférences de presse ou aux matches. Ce qui nous intéresse, c’est les parcours intéressants, les histoires derrière les acteurs du foot”. Et une bonne dose d’humour, avec ses interviews décalées et ses jeux de mots à tous les coins de phrase qui ont fait la marque de fabrique du journal.
Parmi ses 80 000 lecteurs mensuels, 11Freunde veut atteindre évidemment un public diver- sifié : “Nous avons environ 20 % de femmes. Dans un milieu aussi masculinisé, c’est bien, et les chiffres augmentent. Avant la Coupe du monde féminine de 2011, nous avions lancé un magazine 11Freundinnen. Ensuite, c’est vrai que nous avons un public de fans, étudiants ou jeunes actifs, cultivés.” So Foot avec ses 60 000 exemplaires vendus s’adresse aussi “de l’ultra à la tribune VIP. Du collectionneur qui s’intéresse aux vieilles histoires du foot à l’adolescent qui apprécie les blagues du magazine”.
Évidemment, les deux titres s’intéressent à la culture footballistique du pays voisin, même s’ils reconnaissent d’un commun accord l’attrait du public pour les championnats espagnol ou anglais : “Nous suivons évidemment le foot français”, explique Tim Jürgens, “et nous avons fait par exemple un reportage sur la réaction des fans du PSG face à l’arrivée de l’argent venu des investisseurs qataris. La France a eu une génération en or au tournant des années 2000 et je regrette de voir les résultats des Bleus en ce moment”. Chez So Foot, on tourne cela à la blague : “L’image qu’on a du foot allemand, c’est des frappes de loin et des ballons rouges ou orange dans la neige. Bref, c’est assez peu sexy à la base. Mais c’est une image qu’on corrige, parce qu’évidemment il y a beaucoup plus de buts et de spectateurs en Bundesliga qu’en France.”
TEXTE : SEBASTIEN VANNIER
Source : ParisBerlin
Article original : Le foot à contre-pied