L’allemand en mal de recrutement
Faute de candidats de qualité en nombre suffisant, la France peine à pourvoir les postes de professeurs d’allemand. Une amélioration de leurs conditions de travail pourrait apporter une première solution à cette crise des vocations, estime Landry Charrier, maître de conférences à l’université de Clermont-Ferrand.
Les universités françaises accusent le coup. L’allemand y est devenu une denrée tellement rare que certains départements ont commencé à fermer leurs portes. Cette situation n’a finalement rien de surprenant. Elle est la conséquence des difficultés rencontrées par le secondaire au début des années 2000. Cette désaffection estudiantine menace à présent le recrutement de professeurs d’allemand et donc, par effet de ricochet, l’embellie que Frédéric Auria s’attachait à décrire dans son article du mois de novembre dernier (« Et la langue dans tout ça ? », p. 98).
Des concours de recrutement en mal de candidats
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : sur les 368 inscrits à l’agrégation externe d’allemand en 2012, seuls 153 étaient effectivement présents lors des épreuves d’admissibilité. 50 postes étaient à pourvoir. Soucieux de ne pas déroger aux règles d’excellence inhérentes à un tel concours, le jury n’en a attribué que 49… en grande partie à des certifi és déjà en poste. La situation est encore plus inquiétante au niveau du CAPES où le nombre de candidats admis à l’oral (228) a été pour la première fois inférieur aux quelques 230 postes mis au concours (55 de plus qu’en 2011 !).
Là encore, le jury a refusé de transiger sur les compétences linguistiques et les connaissances culturelles minimales d’un futur enseignant et en a attribué seulement 184. Au moment où le ministère de l’Éducation nationale vient d’annoncer que 270 postes de certifi és seraient à pourvoir lors de la session du mois de juin 2013, on peut raisonnablement se demander comment il sera possible de tous les affecter. La question devient encore plus pertinente quand on sait qu’une seconde campagne de recrutement sera lancée courant 2013 (la fameuse campagne « 2014-A ») pour répondre aux ambitions du président Hollande.
Des besoins significatifs, des situations professionnelles difficiles
Les besoins dans la discipline étant signifi catifs, les postes ne pouvant être pourvus, faute d’un vivier suffisamment important, les chefs d’établissement sont de plus en plus nombreux à chercher des enseignants et ce, dès la rentrée. Voilà qui explique pourquoi les effectifs de contractuels ont littéralement explosé, passant de 35 en 2006 à 783 en 2012 (source : Association des germanistes de l’enseignement supérieur). On s’en inquiétera d’autant plus que dans un nombre non négligeable de cas, ce sont des étudiants censés se préparer au(x) concours qui remplissent ces missions particulièrement exigeantes.
Comment remédier à cette crise des vocations ? Il nous semble dans un premier temps nécessaire de travailler à améliorer la situation des enseignants d’allemand. Souvent écartelés entre plusieurs établissements – deux, trois et, dans certains cas même, quatre ! –, ils souffrent par ailleurs d’une forte instabilité géographique. Peu propice à la réalisation de projets professionnels sur le long terme, cette situation comporte également toute une série d’inconvénients personnels. S’attaquer à ces “maux” pourrait contribuer à changer le regard que les jeunes portent sur le métier et donc susciter de nouvelles vocations. Faute de candidats de qualité en nombre suffisant, la France peine à pourvoir les postes de professeurs d’allemand. Une amélioration de leurs conditions de travail pourrait apporter une première solution à cette crise des vocations, estime Landry Charrier, maître de conférences à l’ université de Clermont-Ferrand.
TEXTE : LANDRY CHARRIER
Source : ParisBerlin
Article original : L’allemand en mal de recrutement